Propage mes tweets dans tout l'Univers, lui dit-il. Silver Surfer s'élance vers les mondes habités |
Journal de la Rêvolution
« Délire
laborieux et appauvrissant que celui de composer de vastes livres ; de
développer en cinq cent pages une idée dont la parfaite exposition orale tient
en quelques minutes. Procédé bien meilleur celui de feindre que ces livres
existent déjà, et d’en présenter un résumé, un commentaire. C’est ainsi que
procédèrent Carlyle dans Sartor resartus;
Butter dans The Fair Heaven :
ouvrages imparfaits aussi puisqu’ils ne sont pas
moins tautologiques que les autres. Plus raisonnable, plus incapable, plus
paresseux, j’ai préféré écrire des notes sur des livres imaginaires. »
- J.L.B Buenos-Aires, 10
novembre 1941.
« Deux dangers menacent le monde :
l’ordre et le désordre. »
- Paul
Valéry (1871-1945), La Crise de
l’esprit ;
cité par Claude Simon (1913-2005) en
épigraphe au Vent.
*
Selling
England by the Pound was the fifth studio album from the
English progressive rock band Genesis, released in October 1973 on Charisma
Records. "Firth Of Fifth" was on the third track of Side One. The
album is a masterpiece of English folk & rock culture of the seventies. It
contains so beautiful songs and music.
The path is clear
Though no eyes can see
The course laid down long before.
And so with gods and men
The sheep remain inside their pen,
Though many times they’ve seen the way to leave.
-
Lyrics from Firth of Fifth
*
“When the Rights of Man were
proclaimed for the first time, they were regarded as being independent of
history and the privileges which history had accorded certain strata of
society. The new independence constituted the newly discovered dignity of man.
From the beginning, this new dignity was of a rather ambiguous nature.
Historical rights were replaced by natural rights, "nature" took the
place of history, and it was tacitly assumed that
nature was less alien than history to the essence of man. The very language of
the Declaration of Independence as well as of the Declaration des Droits de
I'Homme—"inalienable," "given with birth,"
"self-evident truths"—implies the belief in a kind of human
"nature" which would be subject to the same laws of growth as that of
the individual and from which rights and laws could be deduced. Today we are
perhaps better qualified to judge exactly what this human "nature"
amounts to; in any event, it has shown us potentialities that were neither
recognized nor even suspected by Western philosophy and religion, which for
more than three thousand years have defined and redefined this
"nature." But it is not only the, as it were, human aspect of nature
that has become questionable to us. Ever since man learned to master it to such
an extent that the destruction of all organic life on earth with man-made instruments has become conceivable
and technically possible, he has been alienated from nature. Ever since a
deeper knowledge of natural processes instilled serious doubts about the
existence of natural laws at all, nature itself has assumed a sinister aspect.
How should one be able to deduce laws and rights from a universe which
apparently knows neither the one nor the other category?”
- H. Arendt, “Decline of
Nation-State. End of Rights of Man”, The
Origins of Totalitarianism, Second Ed. 1958 Meridian Book NY, p 298
Living a human life in dignity (and dying for
it) or living like an animal in a camp (and dying anyway)? Both choices are the
tragedy of life which is inevitable. What does it mean to be a human? Fighting
for some ideas.
We make our choices to be like animals or to
be humans, this is what Arendt meant. We are not "human" by birth right.
We become humans.
*
« Le respect inconditionnel de la
personne humaine est un absolu de la pensée démocratique. »
... nos états démocratiques qui retirent un
certain nombre de droits protégeant les plus démunis ou les plus faibles (au
nom de "l'efficience économique") sont-ils consistants avec le primat
du respect de la personne humaine en toutes circonstances ? Nous en doutons
fort. Il n'y a pas plus d'absolu ou de supériorité morale de la pensée
démocratique que dans une tyrannie. La différence entre les deux régimes est
celle de l'habeas corpus.
En effet, la question des sources du Droit est importante pour fonder sa
légitimité (prétention à édicter la norme et distinguer le fait), sur quelque
conception d'une immanence ou d'une transcendance : i.e. l'origine de la
vérité. Du moins dans l'univers non-totalitaire. Car dans l'univers totalitaire
le Droit sera fondé sur la prétention objective de la nature, de l'histoire ou
du marché à diriger la société "comme un seul homme" et ne marquera
plus de distance lors de sa traduction en normes et règles aussi diverses
qu'absurdes ou tatillonnes. Est-ce pertinent ?
Le mythe de la Raison et de l'Homme nu face à la Nature. Ce n'est plus
une position philosophique sérieuse. C'est aussi une simplification à nos yeux
aujourd'hui abusive, d'où découlent toutes ces fictions dichotomiques qui
rendent la pensée schizophrénique.
*
Aux origines du fascisme, les freikorps, ces
"soldats perdus" de la Grande Guerre qui s'auto-constituent porteurs
d'un idéal politique de rupture. Relire Jünger et les Orages d'acier. Comment ne pas revenir transformé, transfiguré par
cette mystique du sang et du feu, lorsqu'on sortait vivant de cet enfer-là, de ce qu'on y avait vu et vécu ? Le phénomène a
eu lieu dans tous les pays belligérants à des degrés divers. Cette révolte des
soldats. Les associations d'anciens combattants en France, les Croix de Feu et la tentative ratée d'insurrection de février '34.
Côtoyer la mort et en revenir avec
la tête de mort comme drapeau : victoire sur la Méduse ?
*
Augmentation des dépenses militaires US et priorités stratégiques :
la maîtrise des océans, thalassocratie contre empire continental. Navires
sophistiqués ultralégers et maniables pour le support d’opérations amphibies.
Rimland and Heartland … Mackinder
*
A propos de la Philosophie des formes
symboliques d’Ernst Cassirer.
Sous sa forme étroite ou basse,
dégradée, le rationalisme produit autant de réduction de la pensée que le
fanatisme religieux et se comporte de manière sectaire et au final, dans la
lutte pour le pouvoir réel, sanguinaire. C'est une religion comme les autres,
la religion laïque. Alors que sous sa forme haute, ouverte à la pluralité des
possibles, tolérante des visions du monde qui apportent chacune une richesse
incomparable à l'édification d'un monde commun infini, les Lumières de la
raison intègrent les symboles comme autant de sources de sens, d'entendement,
de pensée féconde. Aucune pensée ne devrait être étrangère à la pensée. On
pourra dire : déisme, religion naturelle, intégration du transcendant dans l'intramondain,
du rêve à l'expérience, du romantisme au classicisme, d'Apollon et de Dyonisius.
Tout cela est vrai et inclusif. La philosophie est juste trop pauvre dans ses
moyens d'expression pour en rendre pleinement compte. Elle dit à l'Art : prend
ma place pour dire la vérité du symbole. Ou à la contemplation, ce qui revient
au même. Le Beau domine le Vrai et le Bien. Voilà pourquoi à l'Aufklärung succède comme un frère jumeau le romantisme allemand. Le second n'est pas
la déchéance du premier. Il en est une expression plus riche. Voilà pourquoi à
l'étude des sources grecques et latines les frères Schlegel et d'autres se
tournent vers l'étude de la langue du peuple, la langue parlée, riche en
mythes, en fécondités qui disent le travail, la valeur, les sens du peuple. La
langue appauvrie du rationalisme désenchanté et de la quantification détruit
les savoir-faire, les techniques anciennes au nom d'un savoir jugé seul vrai ;
celui de la dernière nouveauté qui abolit toutes les autres. Misère de la
science qui évacue ainsi sa part d'histoire et de mémoire. Misère des
techniques et des métiers qui se perdent au nom du dernier gadget à consommer
et à jeter. La raison appauvrissante conduit dès lors à la seule religion qui
prétende gouverner les coquilles vides de nos humanités : profit, consommation,
destruction. Oui, il faut apprendre à relire les symboles, ces formes riches,
élaborées, complexe des idées, pour elles-mêmes, pas pour ce quoi elles
tendent. Philosopher c'est apprendre avec sagesse à préserver le détail des
significations contre la généralité des abstractions. Ou pour le dire autrement
: les monstres sont aussi nos amis.
*
A propos du site panslaviste et
orthodoxe Katehon, dans lequel on trouve le philosophe politique russe
« d’extrême-droite » Alexandre Douguin.
L’extrême droite est une catégorie politique parlementaire comme les
autres (ou presque), dont le fonds de commerce consiste à recycler des idées
nationalistes et conservatrices ou antimodernistes. Il faut revenir aux
doctrines pour y voir clair. Quelles sont les doctrines sur lesquelles la
droite ou l'extrême-droite s'est construite ? Le nationalisme en est une bien
qu’il y ait quelques contre-exemples de nationalismes de gauche. Mais tout comme
le libéralisme, le nationalisme fait partie des concepts vides dans l'usage
publicitaire qui en est fait aujourd'hui, car la seule chose qui compte pour la
presse ou les sondeurs d’opinions revient à réduire, étiqueter et classer des
philosophies politiques, des visions du monde, sur le rayonnage d’un magasin
aux idées, bien sagement rangées de gauche à droite, chaque pensée mise en pot pour
le choix d’un citoyen, consommateur de slogans comme de marques de lessive. Il
est plus facile de repérer l’ami ou l’ennemi en y accolant un signe
différentiateur simple et qui renvoie en fin de compte à une des orientations
de base dans l’espace. Pourquoi la « gauche » et la
« droite » et pourquoi pas aussi le camp politique de
« face » ou de l’ « arrière », du « haut » ou du
« bas » ? Voilà qui aurait au moins le mérite de nous restituer
toutes les orientations de notre station debout de bipèdes vaguement
intelligents, mais non, alors que la vie politique et la vie sociale relèvent
des constructions les plus sophistiquées produites par l’évolution naturelle de
l’espèce humaine dont nous faisons partie, nous sommes sommés de nous orienter
sur une droite, dans un espace unidimensionnel et point-barre, ou period comme dirait l’autre comique « trumpeur ».
J’ai trouvé le site Katehon suite à la lecture du livre d'Agamben, pour tenter
d’y voir plus clair. Ce site est un bel exemple de détournement du sens
originel du mot « katehon » qu'on trouve chez St-Paul, d’un sens
religieux, voire eschatologique, à une sens géopolitique. Et donc pour les curieux,
c’est ici.
*
Considérations politiques sur les Coups d’État, Gabriel Naudé, 1639
(cité in Julien Freund, Qu’est-ce que la politique?), ou de la justification de la St-Barthélémy par la raison d'Etat. Jusqu'où le Souverain est-il autorisé à mener l'exercice de la violence légitime pour garantir la paix civile? Très loin.
*
Le paradoxe de la liberté
La liberté de conscience est la seule garantie constitutionnelle avec le
respect des droits humains fondamentaux (dont elle fait partie) qui protège la
société de la tyrannie ou de la dictature. Renier cette liberté au nom d'une
comparaison historique connue avec les années 1930 et le risque de porter au pouvoir un parti politique liberticide, n'est pas raisonnable : car elle prépare alors inévitablement le chemin de
la dictature. Comment sortir du léger paradoxe entre ces deux propositions en apparence symétriques : "la liberté de conscience pourrait mener par des chemins détournés à la dictature librement consentie" versus "l'absence de
liberté de conscience mène droit à la dictature" ? En réaffirmant la primauté
du droit sur le fait et sur les opinions. Nous vivons en régime démocratique et
pluraliste. C'est cette liberté là qui doit être préservée et respectée chez
autrui de toutes les dérives possibles, y compris, surtout, chez ceux dont les opinions ne nous plaisent pas. Respect absolu du droit de conscience d'autrui. À chacun d'y veiller par la défense et
l'illustration des valeurs auxquelles il est attaché, dans le respect et le
dialogue. S'interdire de franchir le premier le seuil au-delà duquel ce droit disparait et où ne s'exerce plus que la violence, mais être prêt à répondre à la violence via le seul instrument que la collectivté reconnait pour y avoir déposé le droit d'exercer la violence légitime: l'Etat de droit.
Ainsi que l'écrit Simone Weil au début de L'Enracinement, les droits de l'homme n'existent pas dans l'absolu, il n'y a que des obligations auquelles chacun est tenu vis-à-vis de lui-même; c'est autrui qui nous reconnaît des droits et donc réciproquement, il est de notre devoir des les reconnaitre à autrui. Sans collectivité politique les droits de l'homme n'existent pas. L'homme seul face à l'univers n'a aucun droit. La liberté procède donc directement de la pluralité de la condition humaine, qui est le seul fait de nature tangible, celui de l'inégalité naturelle de la naissance, par l'octroi réciproque des droits (de conscience, d'expression etc) qui définissent un horizon possible vers lequel l'idéal d'égalité qui est celui de la justice pourra tendre. D'où procède l'obligation individuelle, le devoir initial qui est donc au-dessus des droits, qui nous force à respecter ce devoir d'accorder des droits à autrui? Du Ciel, dit Simone Weil. En naturalisant les droits de l'homme, la Révolution française a éliminé de l'équation sociale le devoir moral d'obéissance à une Loi d'origine transcendante: ne restent plus alors que des droits en compétition les uns avec les autres avec le risque que l'Etat ne devienne l'otage d'une faction.
Ainsi que l'écrit Simone Weil au début de L'Enracinement, les droits de l'homme n'existent pas dans l'absolu, il n'y a que des obligations auquelles chacun est tenu vis-à-vis de lui-même; c'est autrui qui nous reconnaît des droits et donc réciproquement, il est de notre devoir des les reconnaitre à autrui. Sans collectivité politique les droits de l'homme n'existent pas. L'homme seul face à l'univers n'a aucun droit. La liberté procède donc directement de la pluralité de la condition humaine, qui est le seul fait de nature tangible, celui de l'inégalité naturelle de la naissance, par l'octroi réciproque des droits (de conscience, d'expression etc) qui définissent un horizon possible vers lequel l'idéal d'égalité qui est celui de la justice pourra tendre. D'où procède l'obligation individuelle, le devoir initial qui est donc au-dessus des droits, qui nous force à respecter ce devoir d'accorder des droits à autrui? Du Ciel, dit Simone Weil. En naturalisant les droits de l'homme, la Révolution française a éliminé de l'équation sociale le devoir moral d'obéissance à une Loi d'origine transcendante: ne restent plus alors que des droits en compétition les uns avec les autres avec le risque que l'Etat ne devienne l'otage d'une faction.
*
Quand Le Maître du Haut-Château (P.K. Dick), La Guerre des Mondes (le célèbre radio-show, coup de bluff génial d’Orson
Welles en 1938) et Donald Trump se rejoignent: comment passer d’une réalité alternative à l’autre.
*
Cinétiques de l’Héliophore
*
« LE PROGRAMME EN QUELQUES SIÈCLES
On supprimera la Foi
Au nom de la Lumière,
Puis on supprimera la lumière.
On supprimera la Foi
Au nom de la Lumière,
Puis on supprimera la lumière.
On supprimera l'Âme
Au nom de la Raison,
Puis on supprimera la raison.
On supprimera la Charité
Au nom de la Justice
Puis on supprimera la justice.
Au nom de la Raison,
Puis on supprimera la raison.
On supprimera la Charité
Au nom de la Justice
Puis on supprimera la justice.
On supprimera l'Amour
Au nom de la Fraternité,
Puis on supprimera la fraternité.
On supprimera lˆEsprit de Vérité
Au nom de lˆEsprit critique,
Puis on supprimera l'esprit critique.
Au nom de la Fraternité,
Puis on supprimera la fraternité.
On supprimera lˆEsprit de Vérité
Au nom de lˆEsprit critique,
Puis on supprimera l'esprit critique.
On supprimera le Sens du Mot
Au nom du sens des mots,
Puis on supprimera le sens des mots
On supprimera le Sublime
Au nom de l'Art,
Puis on supprimera l'art.
Au nom du sens des mots,
Puis on supprimera le sens des mots
On supprimera le Sublime
Au nom de l'Art,
Puis on supprimera l'art.
On supprimera les Écrits
Au nom des Commentaires,
Puis on supprimera les commentaires.
On supprimera le Saint
Au nom du Génie,
Puis on supprimera le génie.
Au nom des Commentaires,
Puis on supprimera les commentaires.
On supprimera le Saint
Au nom du Génie,
Puis on supprimera le génie.
On supprimera le Prophète
Au nom du poète,
Puis on supprimera le poète.
Au nom du poète,
Puis on supprimera le poète.
On supprimera les Hommes du Feu
Au nom des Eclairés
Puis on supprimera les éclairés.
Au nom des Eclairés
Puis on supprimera les éclairés.
On supprimera lˆEsprit,
Au nom de la Matière,
Puis on supprimera la matière.
AU NOM DE RIEN ON SUPPRIMERA L'HOMME ;
ON SUPPRIMERA LE NOM DE L'HOMME ;
IL N'Y AURA PLUS DE NOM ;
Au nom de la Matière,
Puis on supprimera la matière.
AU NOM DE RIEN ON SUPPRIMERA L'HOMME ;
ON SUPPRIMERA LE NOM DE L'HOMME ;
IL N'Y AURA PLUS DE NOM ;
NOUS Y SOMMES. »
- Armand Robin Les Poèmes Indésirables (1945)
*
Dans le métro, quartier européen de Bruxelles, une dame anglophone bien
élevée, très gentille, plutôt jeune, qui demande un peu d'argent et
"some food"... "pas de problème" dit-elle en s'excusant.. à n'y rien
comprendre... demain, la plupart d'entre nous seront-ils à la rue?
Est-ce le "nouveau territoire commun" auquel une bonne partie de
l'humanité, entre exils, émigrations forcées, déshérence et déclassement
sera condamnée ? Car j'ai vu les "Dalits" dans les rues des grandes
villes du nord de l'Inde, par milliers, chez eux vivant (de la naissance
à la mort) dans la rue. Mais c'est l'Inde éternelle me disais-je...
Mais c'est l'Europe aussi dans un grand effort d'égalisation des classes
sociales.
*
Merci à :
JLB pour son
ironie
Ian Mc Donald
pour l’extraordinaire River of Gods (Le fleuve des dieux, I: Gangâ Mâtâ, II. Sat Chid Ekham Brahmâ)
et aux Natchez de Chateaubriand pour leurs beautés
et aux Natchez de Chateaubriand pour leurs beautés
Remerciement spécial à Maurice G. Dantec (Grenoble, 13 juin 1959 –
Montréal, 25 juin 2016), « écrivain nord-américain de langue
française » comme il se définissait lui-même, à qui j’emprunte le titre de
« Théâtre des opérations » pour le texte que vous venez de parcourir.
Précédents épisodes du Théâtre des Opérations