« Homme et cheval », in Jean-Baptiste de Pannafieu (auteur) et Patrick Gries (photographies), Evolution, Ed. Xavier Barral, 2011 |
Envoi (Darwin de retour du voyage du Beagle)
En me promenant
dans l’oeuvre monumentale de Charles Darwin rassemblée en ligne
sur un remarquable site d’archives, je trouve les pages suivantes
de son Carnet B dans lequel il a l'intuition de l'arbre phylogénétique. C'est un schéma célèbre dans lequel il devine la filiation des formes vivantes vers un ancêtre unique. L'année de la publication de l'Origine des espèces est 1859. Il dit que tous les mammifères ont un ancêtre commun. Il attendra 1871 pour publier The Descent of Man, and Selection in Relation to Sex. Mais avant cette date, de nombreux lecteurs auront compris que "l'homme descend du singe". Scandale énorme!
Darwin, C. R. Notebook B: [Transmutation of species (1837-1838)]. CUL-DAR121.- Transcribed by Kees Rookmaaker. (Darwin Online, http://darwin-online.org.uk/)
p. 36
I think
Case must be that one generation then should be as many living as
now. To do this & to have many species in same genus (as is)
requires extinction.
Thus between A & B immense gap of relation. C & B the finest gradation, B & D rather greater distinction. Thus genera would be formed. — bearing relation
Thus between A & B immense gap of relation. C & B the finest gradation, B & D rather greater distinction. Thus genera would be formed. — bearing relation
p. 37
to ancient types. — with several extinct forms
for if each species an ancient (1) is capable of making 13 recent forms1, twelve of the contemporarys must have left no offspring at all2, so as to keep number of species constant. —
With respect to extinction we can easy see that variety of ostrich, Petise may not be well adapted, and thus perish out, or on other hand like Orpheus being favourable
for if each species an ancient (1) is capable of making 13 recent forms1, twelve of the contemporarys must have left no offspring at all2, so as to keep number of species constant. —
With respect to extinction we can easy see that variety of ostrich, Petise may not be well adapted, and thus perish out, or on other hand like Orpheus being favourable
1 In the diagram there are 13 lines that have a
perpendicular line at the end. [Ba]
2 In the diagram
there are 12 lines that are without a perpendicular line at the end.
[Ba]
p. 38
many might be
produced. — This requires principle that the permanent varieties
produced by inter confined breeding & changing
circumstances are continued & produced according to the
adaptation of such circumstances, & therefore that death of
species is a consequence (contrary to what would appear from America)
---
variations
variations
La théorie de
l’évolution énoncée en 1859 par Charles Darwin dans son opus
majeur L’Origine des espèces, constitue une révolution
intellectuelle toujours mal comprise. Des raisons psychologiques très
fortes s’y opposent : notre prédisposition – je dirais
« naturelle », à donner un sens aux événements en
fonction d’une finalité, d’un but, d’y voir à l’oeuvre la
volonté créatrice des individus (le mythe de la liberté) ou de
puissances transcendantes (le destin, la Nature). Le philosophe et
naturaliste Lamarck avait, avant Darwin, énoncé une théorie de
l’évolution des espèces basée sur ce genre d’argument
finaliste (« la fonction créé l’organe »).
Si les girafes ont des cous allongés, c’est pour pouvoir
atteindre les sources de nourriture en hauteur etc. Darwin a renversé
l’argument : les « girafes » aux longs cous se
trouvaient par hasard à la bonne place et au bon moment et du fait
de cet avantage dans leur environnement ont put se multiplier
(« l’organe créé la fonction »). Rien ne s’oppose
plus fort je crois à ce biais cognitif qui nous pousse à privilégier
une explication en terme de finalité ou d’intentionnalité, que le
principe d’une génération aléatoire des causes à l’origine
des variations observables. Darwin dit que le hasard intervient
seulement sous forme de causes mal identifiées – dans la source
des variations au niveau des cellules reproductrices, ce que nous
appelons aujourd’hui des mutations, qui conduisent à l’apparition
de différences individuelles ; la sélection des
caractéristiques « les plus aptes » produites par
hasard, ne doit rien par contre au hasard en tant quel tel, mais
exprime le résultat des contraintes du milieu qui opèrent le tri
entre variations favorables ou défavorables. Il s’agit de la
formulation d’un principe d’utilité (contingent et non pas
prévisible, l’argument finaliste ne se cache pas derrière ce
principe de « l’utile »), effet mécanique si l’on
veut des contraintes que l’environnement fait subir aux individus.
On sait que Darwin trouva la clé du principe de sélection naturelle
après avoir lu L’Essai sur le principe de population de
Malthus, qui explicite cet axiome (posé par Hume ? par Adam
Smith?) du « problème économique fondamental »
(l’utilisation de ressources rares pour satisfaire des besoins
primordiaux, en nombre croissant, par exemple du fait de
l’augmentation de la population). Dans cette vision assez mécaniste
et fermée, les populations sont soumises à une pression de
sélection qui conduit les « plus aptes » à utiliser les
ressources limitées dont ils ont besoin pour se reproduire (sans
filiation, pas de création d’espèce ou d’évolution). Cela me fait penser à cette réflexion entendue
concernant les « dirigeants politiques européens sans
enfants ». Comment peut-on « penser » l’avenir
(au sens de s’en préoccuper vraiment) quand on n’a pas
d’enfants ? Je laisse cette question au bord du chemin mais
renvoie à ce lien :
https://leblogalupus.com/2017/05/17/des-dirigeants-sans-enfants-menent-une-europe-somnambule-a-labime/.
Que cela nous plaise ou non, l’évolution biologique et l’histoire humaine se ramènent à des fondamentaux qui ont pour noms, génétique des populations et masses démographiques : le fameux « nombre des hommes » qui fait l’histoire, cher à Fernand Braudel et aux historiens de l’école des Annales, est un de ces paramètres de poids qu’il serait vain de négliger ou d’ignorer.
Que cela nous plaise ou non, l’évolution biologique et l’histoire humaine se ramènent à des fondamentaux qui ont pour noms, génétique des populations et masses démographiques : le fameux « nombre des hommes » qui fait l’histoire, cher à Fernand Braudel et aux historiens de l’école des Annales, est un de ces paramètres de poids qu’il serait vain de négliger ou d’ignorer.
Donc Darwin met
l’accent sur la pression de sélection qui procède d’une logique
de maximisation de l’utilité sous contraintes « économiques »
(au sens large du terme, ce principe s’appliquant à l’ensemble
du règne vivant). Une des conséquences fortes de la théorie
darwinienne appliquée aux sociétés humaines me paraît être la
suivante : de la même manière qu’il n’y a pas d’hérédité
des caractères acquis (notre « expérience » de la vie
ne se transmet pas via nos gènes à notre descendance ; la
seule chose qui s’y transmette génétiquement est le code de notre
ADN au moment de la conception), et que chaque génération animale
est confrontée aux mêmes difficultés potentielles par rapport aux
changements de l’environnement (qui sont le plus souvent lents et
graduels) ; de façon semblable il n’y aurait pas plus de
« transmission d’expérience » entre générations de
l’espèce humaine. Scandale !
Et la Culture alors ? N’est-ce pas justement l’instrument fabriqué par l’évolution qui nous permet de briser les contraintes de l’évolution biologique ? Oui certes, mais il me semble, sans que cela rende la culture inféconde, que cette dernière, qui est en effet le produit de l’évolution d’Homo Sapiens avec son gros cerveau, l’art, le langage, les outils etc, bien que dotée d’un formidable pouvoir de transmission et d’apprentissage (de réduction du désordre), ne serve en définitive pas à grand-chose face à la double contrainte issue de la loterie génétique d’une part et de la pression de sélection d’autre part. Qui nierait que cette pression ne s’est pas calmée dans notre espèce en dépit de tout le progrès scientifique ou technique ? Venez faire un tour en Grèce ces temps-ci et mettez votre nez dans la vie quotidienne des gens, je n’y vois rien d’autre que l’application d’un « darwinisme social » décrété par les dirigeants européens sur un peuple plus faible qu’eux. La pression de sélection et la réalité de l’économie, voilà des paramètres que l’on peut comprendre évidemment mais quid de la loterie génétique ? Est-ce toujours aussi important que pour les animaux ? Je dirais oui, suivant le raisonnement darwinien que ce sont justement les individus qui, réussissant à transmettre leur patrimoine à la génération suivante, passent à travers le filtre du hasard moléculaire et des contraintes de l’économie qui sont les véritables acteurs de l’évolution de l’espèce. Pour eux, pour nous tous, la culture est une illusion nécessaire, mais rien de plus qu’une illusion. J’en tiens pour preuve (si l’on veut) et je ne m’en réjouis pas, le fait que la connaissance de l’histoire ne nous protège pas de la répétition des erreurs des générations précédentes, et que la politique est juste le grand spectacle de la mise en scène du pouvoir, que par conséquent elle ne sert à rien qu’à dévorer des ressources rares et précieuses, qu’elle constitue en quelque sorte, avec la religion, l’illusion suprême (mânes de Marx et de Freux, reposez en paix).
Et la Culture alors ? N’est-ce pas justement l’instrument fabriqué par l’évolution qui nous permet de briser les contraintes de l’évolution biologique ? Oui certes, mais il me semble, sans que cela rende la culture inféconde, que cette dernière, qui est en effet le produit de l’évolution d’Homo Sapiens avec son gros cerveau, l’art, le langage, les outils etc, bien que dotée d’un formidable pouvoir de transmission et d’apprentissage (de réduction du désordre), ne serve en définitive pas à grand-chose face à la double contrainte issue de la loterie génétique d’une part et de la pression de sélection d’autre part. Qui nierait que cette pression ne s’est pas calmée dans notre espèce en dépit de tout le progrès scientifique ou technique ? Venez faire un tour en Grèce ces temps-ci et mettez votre nez dans la vie quotidienne des gens, je n’y vois rien d’autre que l’application d’un « darwinisme social » décrété par les dirigeants européens sur un peuple plus faible qu’eux. La pression de sélection et la réalité de l’économie, voilà des paramètres que l’on peut comprendre évidemment mais quid de la loterie génétique ? Est-ce toujours aussi important que pour les animaux ? Je dirais oui, suivant le raisonnement darwinien que ce sont justement les individus qui, réussissant à transmettre leur patrimoine à la génération suivante, passent à travers le filtre du hasard moléculaire et des contraintes de l’économie qui sont les véritables acteurs de l’évolution de l’espèce. Pour eux, pour nous tous, la culture est une illusion nécessaire, mais rien de plus qu’une illusion. J’en tiens pour preuve (si l’on veut) et je ne m’en réjouis pas, le fait que la connaissance de l’histoire ne nous protège pas de la répétition des erreurs des générations précédentes, et que la politique est juste le grand spectacle de la mise en scène du pouvoir, que par conséquent elle ne sert à rien qu’à dévorer des ressources rares et précieuses, qu’elle constitue en quelque sorte, avec la religion, l’illusion suprême (mânes de Marx et de Freux, reposez en paix).
Darwin,
Marx, Freux, les trois «briseurs d’illusions» de la vision du
monde moderne : l’homme n’est pas le sommet de la création
des êtres vivants ; l’homme est un loup économique pour
l’homme et la société est l'histoire (évolutive) de la lutte des classes ; la culture enfin est une production de l’inconscient qui
nous aide à mieux vivre et surtout à masquer nos angoisses ou habiller nos instincts de motifs plus nobles, plus acceptables. De ces trois gaillards Darwin me semble être aujourd’hui le
moins bien compris. C'est qu'il y est question de science dure, sérieuse, qui repose sur des bases physico-chimiques et dont la complexité aux niveaux élevés de l'évolution défie toute simplification. Comme les autres comparses, il a fait l’objet
de lectures simplistes à fondements idéologiques, justifiant les pratiques inégalitaires d'une société prédatrice. Darwin n’a jamais prétendu
que la sélection naturelle impliquait l’eugénisme au sein de
l’espèce humaine ou la supériorité naturelle d’une race sur
une autre. Il a toujours défendu le principe des lois morales et
considéré que l’altruisme était justifié du point de vue de
l’évolution. Il aurait eu en horreur qu’au nom du détournement
de sa théorie par des « économistes » on tienne la loi
du profit et de l’exploitation capitaliste comme le but à
atteindre pour notre espèce et le critère de réussite des individus. Le détournement de Darwin a commencé très tôt, quelques années après L'Origine des espèces, avec les écrits d'Herbert Spencer.
Je me dis alors qu’il est peut-être nécessaire de s’attaquer sérieusement à cette théorie synthétique de l’espèce humaine, sous les traits des la sociobiologie et des neurosciences, si l’on veut y voir clair. Il est peut-être temps aussi de consigner au rayon des archives une bonne partie du verbiage de la philosophie.
Je me dis alors qu’il est peut-être nécessaire de s’attaquer sérieusement à cette théorie synthétique de l’espèce humaine, sous les traits des la sociobiologie et des neurosciences, si l’on veut y voir clair. Il est peut-être temps aussi de consigner au rayon des archives une bonne partie du verbiage de la philosophie.
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Evo-devo
Evolutionary development biology ou biologie évolutive du développement
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Et encore une superbe photo tirée de l'album Evolution